Quand les femmes réinventent le rapport à la terre
Devenir agricultrice quand on est une femme n’est pas aussi simple qu’il n’y paraît ! À l’heure de l’urgence climatique, des nouvelles paysannes font le choix de ce métier. Elles bouleversent les codes, réclament leurs droits, se regroupent et découvrent un autre rapport à la terre.
Dans son numéro 127 d’Octobre et Novembre 2021, Causette, un journal qui fait l’écho des inégalités de genre qui traversent la société, donnait la parole à plusieurs d’entre elles, dont Mathilde Roger-Louët, votre glacière préférée à Avessac !
Mathilde, éleveuse de vaches laitières et paysanne glacière Bio
« J’ai longtemps travaillé dans le transport routier de marchandises, je m’occupais d’une vingtaine de conducteurs jour et nuit. Puis j’ai rencontré Yoann… Il s’était installé sur la ferme à la suite de ses parents. Je l’ai rejoint en 2014 et je cherchais ma voie. Avec un pied dans la ferme, j’en ai découvert les valeurs. Ça commençait à me parler dans mon coeur.
Et je me suis dit que ce serait royal de transformer le lait de nos vaches en glaces. Je me suis formée pendant trois ans, auprès de maîtres glaciers, ainsi qu’à la Chambre d’agriculture pour approfondir mes connaissances sur l’élevage. »
« Je n’ai rien lâché depuis. On fait quatre réunions par an, où l’on s’écoute sur des sujets qu’on ne peut pas aborder dans un milieu mixte. Il y a aussi des formations thématiques, techniques ou sur les cycles et la méno-pause, la connaissance de son corps, avec une question majeure : à quel moment je mets des limites ? Je sais que si on déplace des bêtes quand j’ai mes règles, ça sera compliqué. Moi, j’ai forcé, et j’ai eu de gros soucis de santé en 2020. J’étais tellement dans l’euphorie du démarrage !
À la ferme, nos rapports de couple mais aussi d’associés ont énormément changé à la suite de ces rencontres.
Il y a aussi la culture dont on hérite : on veut absolument y arriver, on veut être l’égal de l’homme. On est constamment en train de faire nos preuves en tant que femme. Or on n’est pas égaux en termes de charges physiques. Mais tout est fait par et pour des hommes. En pâtisserie, je ne trouve pas de sacs de sucre de moins de 25 kilos… Avec le groupe, on va chez les unes et les autres et on s’aide pour l’aménagement de nos fermes. On travaille sur les risques de blessures, en adaptant nos outils, nos postures, nos attitudes… Ce n’est pas possible qu’on se taise au point de se faire mal physiquement. Ce qui est sûr, c’est que Yoann et moi, on a appris à communiquer et on n’en serait pas là sans le groupe des femmes. »
Propos recueillis par A. L. pour Causette.